Car effectivement la production Rogers fut très bordélique, et ce, à cause en grande partie des différents déménagements des usines la marque.
Du coup, beaucoup de "on dit" concernant les millésimes et modèles se sont greffés sur cette histoire un peu chaotique et la lecture du "Rogers Book" démystifie un peu les choses.
Pour essayer de comprendre pourquoi les Cleveland ont plus la cote je vais faire une longue réponse car il faut impérativement résumer l'histoire de Rogers pour comprendre certains points.
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L'histoire de Rogers commence dans les années 1930 à Farmingdale, puis la petit entreprise déménagera à Covington dans les 50's.
C'est cette bourgade de 2000 hab. qui fit de Rogers un des principaux fabricants de batterie de l'époque par l'alchimie crée par la rencontre de 4 protagonistes :
H Grossman (qui racheta Rogers), de B Strauss alias Mr Rogers (marketing et ventes), de J Thompson (associé et ami de Grossman) et enfin de la communauté de Covington.
Des familles entières de Covington travaillaient alors pour Rogers et Grossman mettait un point d'honneur à ce que la poduction se fasse comme si c'était une seule et grande famille. La Rogers "Family" était née, H. Grossman était "uncle Henry" pour les employés, tout ce petit monde travaillait alors en harmonie.
L'esprit Rogers de la grande époque c'était ça !
Les batteries de cette époque étaient étiquetées Cleveland, d'où la préférence pour les collectionneurs de ce millésime, car c'est réellement le symbole de Rogers.
Cleveland en fait, s'occupait du stockage et de la distribution se trouvait à 225 miles de Covington où la production était assurée.
C'est après que les choses se sont gâtées en terme de production et distribution. Suite à la vente de Rogers à CBS par Grossman en 66, les compétences de Cleveland ont été déplacées à Dayton (à 25 miles de Covington).
Début des problèmes chez Rogers car :
- la plupart des employés de Dayton étaient novices et de surcroit n'y connaissaient rien au monde de la "batterie" ce qui ne facilitait pas les choses.
- même si le personnel de Covington restait le même, de nouvelles directives de production et d'organisation avaient été imposées par la nouvelle direction de CBS.
Puis en 67 les équipements de la fabrication partent à Dayton où les batteries vont y être fabriquées pendant 2 ans.
C'est là que l'esprit familiale de l'usine éclata, l'esprit communautaire n'y était plus.
En 69, le coup de grâce, avec le déménagement à Fullerton, seule une poignée de d'employés ont suivi… c'était la fin de l'esprit Rogers.
L'énorme savoir-faire du personnel existant part alors en fumée…
Grosse erreur car production à Fullerton a alors chutée et Rogers perdait beaucoup d'argent. Il a fallu 2 ans à Fullerton pour atteindre le stade de 1000 batteries/semaine alors qu'à Covington ils étaient à 1800/semaine ce qui ne voulait pas dire que la qualité n'était plus là, mais surtout que la production ne fonctionnait plus aussi bien qu'avant.
Donc en parcourant cette histoire on se rend compte que Rogers, plus que les autres marques, fut un symbole d'une sorte d'idéal américain d'une autre époque, celle d'avant le rachat des fabricants de batteries (Rogers, Ludwig, Slingerland…) par de grosses compagnies qui voulaient se diversifier.
Maintenant question son et qualité (on en revient au vif du sujet) c'est une autre histoire :
Les fûts ont été les mêmes depuis les modèles Cleveland jusqu'aux XP8.
Ils n'étaient pas fabriqué par Rogers, mais achetés chez Jasper (ou Slingerland pour les grands diamètres) pour les toutes premières Cleveland en 3ply puis Keller pour les 5 ply.
B Strauss considérait d'ailleurs que le type de bois utilisé dans la fabrication est important, mais pas LE plus important.
Il considérait également que le son venait de la qualité des chanfreins et que moins il y avait de contact entre la peau et le fût, meilleur était le son. D'où la non utilisation de chanfreins arrondis, et l'utilisation de fûts au diamètre inférieur pour que le peaux passent sans forcer.
Donc rien n'indique qu'une Cleveland puisse mieux sonner qu'une Dayton ou une Fullerton car la "recette" a été la même au cours des années, seules les finitions intérieures ont varié (gris aplat puis Granitone en différentes variantes).
Selon les dires de B. Strauss, il trouvait que les meilleures Rogers fabriquées étaient les premières de l'ère CBS (soit les Dayton de 66 à 67) car des pièces de métal avant usinées étaient alors moulées ce qui rendait les batteries plus légères. De plus c'était l'équipe de Covington qui continuait à fabriquer les batteries sous la direction de Thompson (et ce jusqu'à ce que la production bouge à Dayton en 67).
Mais en aucun cas il ne considère que celles produites avant ou d'après "sonnaient moins", mais juste que pour lui c'est à cette période que la production, en termes qualité, été à son summum.
Comme Syrian je possède des fûts de pas mal d'époque de la production de Rogers, jusqu'à un Fullerton de 1972 (9/72 label) qui n'a rien à envier aux autres fûts plus anciens question son et qualité de fabrication, hormis peut être les coquilles qui sont légèrement plus light. Je m'en suis d'autant plus rendu compte car j'ai mis chaque fût à nu avant de changer le rodho. D'ailleurs le moins beau esthétiquement, c-à-d celui avec le plus de raccord, de nœuds et de pâte à bois pour boucher imperfections est un Dayton de 68/69. Je joue donc un mélange de fûts de différentes époque et pourtant je n'ai jamais trouvé qu'un fût faisait tâche avec les autre niveau son.
Pour finir en brouillant les pistes, toujours dans le "Rogers Book", il y a une interwiew de B. Chiasson concernant le datage des fûts qui dit :
En 63 il achète un kit pour ensuite le compléter en 68 avec une autre grosse caisse qui elle à un numéro inférieur à celle de 63 alors qu'elle est équipé avec le hardware caractéristique de 68. Donc surement un fut qui était stocké depuis plusieurs années. Puis même genre d'incohérence avec un fût de 14" acheté encore après…
Il dit avoir identifié des produits à Fullerton et pourtant étiquetés Cleveland, sans parler des étiquettes barrées et corrigées à la main ou autres aberrations.
Sa théorie est que CBS a utilisé le stock d'étiquettes restant… donc méfiance car du label Cleveland pourrait être en fait de la production Fullerton.
Oups je crois que c'est plus long message que j'ai jamais posté…
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